A la manière du questionnaire de Proust, voici une trentaine de questions pour parler de soi.
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Lily, Pierre Perret et Les Ogres de Barback
"On la trouvait plutôt jolie Lily
Elle arrivait des Somalies Lily Dans un bateau plein d’émigrés Qui venaient tous de leur plein gré Vider les poubelles à Paris Elle croyait qu’on était égaux Lily Au pays d’ Voltaire et d’Hugo Lily Mais pour Debussy en revanche Il faut deux noires pour une blanche Ça fait un sacré distinguo Elle aimait tant la liberté Lily Elle rêvait de fraternité Lily Un hôtelier rue Secrétan Lui a précisé en arrivant Qu’on ne recevait que des blancs" |
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“Erasmus ? La réalité a surpassé mes attentes” (Courrier Expat)
Inscrite en master communication publique et politique à Sciences Po Bordeaux, Harmonie Garruchet a fait un séjour d’études en Espagne dans le cadre du programme Erasmus+. Témoignage.
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Le temps
A l'heure où l'on ne cesse de vouloir maîtriser le temps, où l'on veut à tout prix aller plus vite, ne plus vieillir, le thème du temps qui passe fait partie des grands sujets de l' existence humaine. C'est un thème dont on pourrait parler pendant des heures... Si seulement on en avait le temps !
J'ai choisi une fois n' est pas coutume un article extrait du journal Die Zeit, une interview de Karlheinz Geißler "Zeitforscher", sociologue du temps. Une première lecture qui nous remettra les pendules à l'heure. Pour poursuivre, c'est une chanson du groupe Tryo qui a retenu mon attention. Bien entendu, il existe encore tant de chansons qui abordent ce thème, j'en ferai prochainement une sélection que je publierai sur ce post, ainsi qu'un aperçu des expressions avec le mot "temps". Pour vous faire patienter, une jolie citation de Françoise Sagan:" Mon passe-temps favori, c'est laisser passer le temps, avoir du temps, prendre mon temps, perdre mon temps, vivre à contretemps." |
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Boris VIAN, l´hymne à la vie
Je voudrais pas crever, Boris Vian 1952
Je voudrais pas crever Avant d'avoir connu Les chiens noirs du Mexique Qui dorment sans rêver Les singes à cul nu Dévoreurs de tropiques Les araignées d'argent Au nid truffé de bulles Je voudrais pas crever Sans savoir si la lune Sous son faux air de thune A un coté pointu Si le soleil est froid Si les quatre saisons Ne sont vraiment que quatre Sans avoir essayé De porter une robe Sur les grands boulevards Sans avoir regardé Dans un regard d'égout Sans avoir mis mon zobe Dans des coinstots bizarres Je voudrais pas finir ...
une jolie reprise des Têtes raides
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Le Déserteur, Boris Vian 1952
Monsieur le Président Je vous fais une lettre Que vous lirez peut-être Si vous avez le temps Je viens de recevoir Mes papiers militaires Pour partir à la guerre Avant mercredi soir Monsieur le Président Je ne veux pas la faire Je ne suis pas sur terre Pour tuer des pauvres gens C'est pas pour vous fâcher II faut que je vous dise Ma décision est prise Je m'en vais déserter. Depuis que je suis né J'ai vu mourir mon père J'ai vu partir mes frères Et pleurer mes enfants Ma mère a tant souffert Qu'elle est dedans sa tombe Et se moque des bombes Et se moque des vers ...
une belle version chaâbi
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Le temps de vivre ou l'évadé Boris Vian 1954
Il a dévalé[1] la colline Ses pieds faisaient rouler des pierres Là-haut entre les quatre murs La sirène chantait sans joie Il respirait l’odeur des arbres Avec son corps comme une forge La lumière l’accompagnait Et lui faisait danser son ombre Pourvu qu’ils me laissent le temps Il sautait à travers les herbes Il a cueilli deux feuilles jaunes Gorgées de sève et de soleil Les canons d’acier bleu crachaient Des courtes flammes de feu sec Pourvu qu’ils me laissent le temps Il est arrivé près de l’eau Il y a plongé son visage Il riait de joie il a bu Pourvu qu’ils me laissent le temps Il s’est relevé pour sauter Pourvu qu’ils me laissent le temps ...
par Philippe Clay
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La vieillesse
Une planète grisonnante
Briser la conspiration du silence La tragédie de la vieillesse est la radicale condamnation de tout un système de vie mutilant : un système qui ne fournit à l’énorme majorité des gens qui en font partie aucune raison de vivre. Le travail et la fatigue masquent cette absence : elle se découvre au moment de la retraite. C’est beaucoup plus grave que l’ennui. Devenu vieux, le travailleur n’a plus sa place sur terre parce qu’en vérité on ne lui en a jamais accordé une : simplement il n’avait pas le temps de s’en apercevoir. Quand il s’en rend compte, il tombe dans une sorte de désespoir hébété. (…)
Les vieillards sont-ils des hommes ? A voir la manière dont notre société les traite, il est permis d’en douter. Elle admet qu’ils n’ont ni les mêmes besoins ni les mêmes droits que les autres membres de la collectivité puisqu’elle leur refuse le minimum que ceux-ci jugent nécessaire : elle les condamne délibérément à la misère, aux taudis, aux infirmités, à la solitude, au désespoir. Pour apaiser sa conscience, ses idéologues ont forgé des mythes, d’ailleurs contradictoires, qui incitent l’adulte à voir dans le vieillard non pas son semblable mais un autre. Il est le sage vénérable qui domine de très haut ce monde terrestre. Il est un vieux fou qui radote ou extravague. Qu’on le situe au-dessus ou en dessous de notre espèce, en tout cas on l’en exile. Mais plutôt que de déguiser la réalité, on estime encore préférable de radicalement l’ignorer : la vieillesse est un secret honteux et un sujet interdit.
C’est justement pourquoi j’ai écrit ces pages. J’ai voulu décrire en vérité la condition de ces parias et la manière dont ils la vivent, j’ai voulu faire entendre leurs voix : on sera obligé de reconnaître que c’est une voix humaine. On comprendra alors que leur malheureux sort dénonce l’échec de toute notre civilisation : impossible de le concilier avec la morale humaniste que professe la classe dominante. (…) Tout est à reprendre dès le départ : le système mutilant qui est le nôtre doit être radicalement bouleversé. C’est pourquoi on évite si soigneusement d’aborder la question du dernier âge. C’est pourquoi il faut briser la conspiration du silence.
La Vieillesse, Gallimard, Paris, 1970.
Simone de Beauvoir
http://www.monde-diplomatique.fr/2013/06/DE_BEAUVOIR/49163
Briser la conspiration du silence La tragédie de la vieillesse est la radicale condamnation de tout un système de vie mutilant : un système qui ne fournit à l’énorme majorité des gens qui en font partie aucune raison de vivre. Le travail et la fatigue masquent cette absence : elle se découvre au moment de la retraite. C’est beaucoup plus grave que l’ennui. Devenu vieux, le travailleur n’a plus sa place sur terre parce qu’en vérité on ne lui en a jamais accordé une : simplement il n’avait pas le temps de s’en apercevoir. Quand il s’en rend compte, il tombe dans une sorte de désespoir hébété. (…)
Les vieillards sont-ils des hommes ? A voir la manière dont notre société les traite, il est permis d’en douter. Elle admet qu’ils n’ont ni les mêmes besoins ni les mêmes droits que les autres membres de la collectivité puisqu’elle leur refuse le minimum que ceux-ci jugent nécessaire : elle les condamne délibérément à la misère, aux taudis, aux infirmités, à la solitude, au désespoir. Pour apaiser sa conscience, ses idéologues ont forgé des mythes, d’ailleurs contradictoires, qui incitent l’adulte à voir dans le vieillard non pas son semblable mais un autre. Il est le sage vénérable qui domine de très haut ce monde terrestre. Il est un vieux fou qui radote ou extravague. Qu’on le situe au-dessus ou en dessous de notre espèce, en tout cas on l’en exile. Mais plutôt que de déguiser la réalité, on estime encore préférable de radicalement l’ignorer : la vieillesse est un secret honteux et un sujet interdit.
C’est justement pourquoi j’ai écrit ces pages. J’ai voulu décrire en vérité la condition de ces parias et la manière dont ils la vivent, j’ai voulu faire entendre leurs voix : on sera obligé de reconnaître que c’est une voix humaine. On comprendra alors que leur malheureux sort dénonce l’échec de toute notre civilisation : impossible de le concilier avec la morale humaniste que professe la classe dominante. (…) Tout est à reprendre dès le départ : le système mutilant qui est le nôtre doit être radicalement bouleversé. C’est pourquoi on évite si soigneusement d’aborder la question du dernier âge. C’est pourquoi il faut briser la conspiration du silence.
La Vieillesse, Gallimard, Paris, 1970.
Simone de Beauvoir
http://www.monde-diplomatique.fr/2013/06/DE_BEAUVOIR/49163
vieillesse_une_planète_grisonnante_monde_diplo_juin_2013_.pdf |
Robert Lamoureux, éloge de la fatigue
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Vous me dites, Monsieur, que j'ai mauvaise mine,
Qu'avec cette vie que je mène, je me ruine, Que l'on ne gagne rien à trop se prodiguer, Vous me dites enfin que je suis fatigué. Oui je suis fatigué, Monsieur, et je m'en flatte. J'ai tout de fatigué, la voix, le cœur, la rate, Je m'endors épuisé, je me réveille las, Mais grâce à Dieu, Monsieur, je ne m'en soucie pas. Ou quand je m'en soucie, je me ridiculise. ...
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